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L'élément central du film Avatar est sans doute la nature, qui, par de multiples connexions, parvient à créer un gigantesque réseau, une conscience collective. Evidemment James Cameron l'a avant tout créée pour donner encore plus d'intensité au principal message du film qui est la protection de l'environnement. Cependant, nous verrons ici si ces connexions sont (ou pas) compatibles avec notre monde.

Connexions entre animaux

La plupart des animaux de Pandora disposent d'un appendice partant de leur tête, d'une longueur relativement conséquente. Dans le film, cette "queue neuronale" leur permet de se connecter à d'autres individus de la même espèce ou d'espèces différentes. Pour ce faire les extrémités de ces appendices doivent se rejoindre afin de créer un pont de communication. Le seul groupe qui ne semble pas avoir développé cette caractéristique est celui des insectes.

 

Pour tenter d'expliquer ce phénomène, il nous faut d'abord comprendre le fonctionnement du cerveau. 

Chez le mammifère, le cerveau est composé de cellules spéciales : les neurones. Ces neurones ont pour objectif de communiquer et traiter les informations. Plusieurs aires dans le cerveau sont spécialisées dans le traitement de certaines informations (vision, imagination, souvenirs...). Les neurones  peuvent recevoir des signaux nerveux et les convertir en signaux chimiques à l'aide de neurotransmetteurs (molécules qui assurent la transmission du message nerveux entre deux neurones), au niveau de la synapse (extrémité du neurone où se trouve la liaison avec un autre neurone). Ces signaux chimiques rejoindront donc  une dendrite (prolongement qui accueille le message chimique) du neurone lié à la synapse qui reconvertira le message chimique en message nerveux.

Le schéma ci-dessous montre le fonctionnement d'une synapse :

Il existe également des neurones pour lesquels la transmission du message nerveux est électrique. Ceux-ci servent à synchroniser l'activité de certaines populations de cellules (celles du muscle cardiaque par exemple). Nous ne développerons pas ces neurones car ils sont moins fréquents que les neurones à transmission chimique et ne nous seront pas utiles dans ce cas de figure.

Ces fonctionnements sont capitaux dans le fonctionnement du corps et sont parfois la cause de certaines émotions. Par exemple la dopamine présente dans le cerveau humain est une molécule qui est responsable de la sensation de bonheur.

Maintenant que les présentations sont faites, retournons aux appendices neuronaux des animaux pandoriens. Ils sont des prolongements du cerveau, tout comme la moelle épinière qui part de notre cerveau et longe la colonne vertébrale afin de distribuer les nerfs dans le corps et de les relier au cerveau. Nous partirons donc du principe que les queues neuronales ont une construction semblable à une moelle épinière.

La moelle épinière humaine est composée de neurones dits « pyramidaux » en raison de la forme triangulaire du corps principal de leur cellule (le soma). Leur axone peut mesurer jusqu’à un mètre, partant du néocortex jusqu’en bas de la colonne vertébrale. 

La moelle épinière fait la liaison entre le néocortex et tous les autres nerfs du corps. C’est un « point de passage », un pont entre le réseau neuronal cérébral et le réseau nerveux corporel. Les espèces pandoriennes utiliseraient une deuxième moelle épinière pour échanger des informations avec d’autres individus.

Les appendices neuronaux pourraient donc permettre un contact entre les neurones de deux individus qui échangeraient des informations au moyen de molécules chimiques, qui, comme la dopamine chez les Hommes, seraient à la source de certaines émotions. La transmission de messages chimiques entre individus est connue sur Terre ; les fourmis, par exemple, communiquent au moyen de phéromones, des molécules volatiles qui sont émises dans l'air.

Ces appendices auraient donc besoin d'une grande protection, qui semble dans le film assurée par de la peau et une tresse de cheveux chez les Na'vis. 

 

On peut observer des connexions de ce type dans le film à plusieurs reprises, quand les Na'vis se connectent à des animaux. Il y a alors des échanges de molécules entre ces deux êtres vivants qui créent un contact intense, une mise en commun des sentiments qu'exprime chaque individu par des neurotransmetteurs.

 

 

Ainsi, ces appendices neuronaux que portent la plupart des animaux pandoriens semblent expliquables par des mécanismes que les scientifiques connaissent bien. Cependant ces connexions communes à tous ces animaux impliquent un ancêtre commun. Ceci semble peu probable ; un tel ancêtre devrait être extrèmement lointain, et les appendices neuronaux n'auraient très probablement pas pu se conserver durant tout le mécanisme de l'évolution sur autant d'espèces. On peut donc se dire que ces queues neuronales pourraient exister, même si cette existence semble vraiment tirée par les cheveux, si l'on peut dire.

Les liaisons de la flore

Connexions entre faune et flore

Pandora est essentiellement composée de forêts. Selon Grace Augustine (personnage joué par 

Sigourney Weather dans le film) cette lune compte environ 1 000 000 000 000 d'arbres. Mais cette flore a une particularité ; selon le film, les êtres vivants qui la composent sont connectés entre eux et forment une conscience collective.

 

Nous avons brièvement évoqué le fonctionnement complexe d'un cerveau. James Cameron s'est servi de ce fonctionnement pour créer une sorte de cerveau à l'échelle planétaire, où chaque plante est un neurone et chaque racine est un axone (prolongement fibreux d'un neurone permettant la transmission d'un message à d'autres neurones).  Tous ces arbres formeraient donc des connexions entre eux, et Pandora serait finalement un cerveau gigantesque. 

 

 

Il existerait en plus des arbres spéciaux, une espèce qui permetterait un pont de connexion entre la faune et la flore. Deux individus de cette espèce sont représentés dans le film : l'arbre des voix et l'arbre des âmes. Un animal pourrait y connecter son appendice neuronal pour avoir accès à ce cerveau collectif. Nous traiterons plus en profondeur de cette espèce plus tard dans cette page.

Comme nous l'avons vu presque toutes les espèces pandoriennes connues portent cet appendice neuronal. Ceci implique un ancêtre commun. Cependant, cet ancêtre commun doit être suffisamment lointain pour engendrer toutes ces espèces, dont certaines sont radicalement différentes entre elles. On peut donc imaginer un être vivant unicellulaire, qui a ensuite évolué selon ses conditions de vie pour engendrer différents espèces, qui à leur tour ont engendré différentes espèces (selon la sélection naturelle qui implique notamment que les espèces évoluent selon leurs conditions de vie).

Là où le problème survient, c'est quand il faut parler de ces appendices. Cet ancêtre commun porterait déjà un moyen de connexions entre les individus de son espèce, qui aurait évolué pour former l'appendice neuronal. Sauf que les espèces de Pandora semble arborer les mêmes types d'appendices neuronaux. Ceux-ci seraient donc apparus de la même manière sur chaque espèce, et surtout se seraient conservés durant tout le long mécanisme qu'est l'évolution du vivant (d'un ordre de grandeur d'au moins plusieurs centaines de milliers d'années).

L'arbre des voix, dessin réalisé à partir du film Avatar

Nous avons parlé des connexions qui s'opéraient au sein de la faune, puis au sein de la flore. Mais il reste encore une étape qui n'a pas encore été évoquée et que l'on retrouve à de multiples reprises dans le film. En effet, certaines communications qui s'opèrent entre la faune et la flore sont relativement déroutantes et méritent d'être justifiées ou réfutées.

Cette partie n'est pas plus vérifiable que la précédente, le réalisme des mécanismes qui y sont décrits est discutable. En effet nous avons ici besoin d'accepter l'existence d'une conscience collective. Nous allons néammoins tenter d'expliquer ces mécanismes avec des interactions que nous connaissons sur Terre.

Connexions par les appendices neuronaux

Les graines sacrées

La scène finale

On pourrait se demander si ces connexions mènent à une véritable conscience (qui est la déesse Eywa pour les Na'vis). C'est un principe qu'énonce le physicien Trinh Xuan Thuan ; il soutient qu'à l'échelle de la particule, il n'y a probablement aucune conscience en jeu, mais que l'addition de nombreuses particules (qui auront formé des neurones) mène à l'émergence d'une conscience. C'est le phénomène d'émergence. Cependant, il évoque également le point de vue bouddhiste qui dit que la conscience n'est pas liée à l'existence de particules et l'esprit demeure même après la destruction des neurones. Ces deux hypothèses n'ont pas de réponses et n'en auront peut-être jamais, car il s'agit de métaphysique purement spéculative que l'on ne sait pas vérifier. Ainsi, on peut penser qu'une conscience est née des connexions au sein de la flore de Pandora, mais cela ne peut être prouvé. 

On voit, dans une scène du film, un Na'vi connecter son appendice neuronal à l'arbre des voix. Il entend alors les voix de ses ancêtres. Comme il a été dit plus haut, notre hypothèse est que cette espèce d'arbres serait présente sur Pandora comme lieu d'un surgissement de la conscience générée par les connexions de la flore. Une autre de nos hypothèses est que ces arbres délivreraient une drogue faisant entrer les animaux qui y sont connectés en transe (profond état de relâchement pouvant mener à des hallucinations).

Ainsi, les branches de ces arbres énigmatiques pourraient être couvertes d'une substance psychoactive produite par la plante, à la manière de la sève. On connaît ce genre de mécanisme avec les drogues. Ces substances altèrent le fonctionnement normal du cerveau, en causant par exemple la fabrication intensive de certaines molécules. L'autre possibilité est que ces arbres posséderaient des cellules semblables aux neurones, qui formeraient les branches. Cela signifierait qu'ils auraient quelques centaines de moelles épinières pendantes. 

Il s'agit de petits êtres vivants éphémères produits par l'arbre des âmes. Ils ont la particularité de sentir certaines choses et d'être attirés par certains événements, alors qu'ils semblent dépourvus de sens. Au début du film par exemple on peut les voir entourer Jake Sully, comme si ils sentaient que cet individu en particulier avait de l'importance. Dépourvus de sens et certainement très restreints en matière de capacités cognitives, il est peu probable que ces créatures agissent selon leur conscience comme il l'est dit dans le film.

Nous avons déjà vu que la flore pandorienne s’échangeait une multitude d’informations au moyen de connexions entre racines. Ce système leur permettrait d’établir une sorte de « conscience collective » rassemblant tous les végétaux pandoriens. Mais existe-t-il un équivalent sur Terre ?

Les végétaux terriens s’échangent en effet eux aussi des informations, non pas au niveau d’une conscience bien entendu, mais nécessaires à leur survie. Certains arbres, quand ils sont en danger, émettent des phéromones, notamment de l’éthylène. Une variation du taux de cette molécule dans l’air est captée par les végétaux environnants. Ceux-ci réagissent en fonction de leur moyens. L’acacia, par exemple, possède dans ses feuilles une molécule, le tanin, qui les rend proprement immangeable par les herbivores. Lorsque les acacias sont en danger, mangés par ces animaux, ils émettent de fortes doses d’éthylène. Cela a pour effet d’augmenter la concentration du taux de tanin dans les feuilles des acacias proches, et ainsi de freiner l’appétit des animaux, dans le but de préserver l’équilibre de l’écosystème.

Les végétaux terriens entretiennent donc eux aussi un réseau d’information. Nous n’en sommes pas encore à parler de conscience, mais il est certain que ces échanges ont une grande importance dans la survie de ces végétaux.

On pourrait penser que ces créatures sont commandées par autre chose. Ils pourraient être les messagers de la conscience collective (en admettant qu'elle existe) en communiquant avec l'arbre des âmes par des ondes élctromagnétiques (ondes radio par exemple).

Ceci dit leur existence hautement réfutable, car elle impliquerait (en plus de l'existence de la conscience collective) le fait que cette conscience connaisse la position des graines sacrées sur Pandora et parviennent à les guider en fonction de cette position. On pourrait alors penser que celle-ci est déterminée par l'ensemble des arbres de Pandora, mais on s'éloigne de tout équivalent sur Terre.

Lors de la scène finale du film, un rituel Na’vi est invoqué afin de transférer la conscience de Jake Sully et de Grace Augustine, morts, dans les corps de leurs Avatars Na’vis. Mais comment est-ce possible ?

Précédemment dans le film, nous avons déjà pu observer des transferts de conscience entre un humain et un Na’vi, au moyen de technologies que nous ne développeront pas ici. Dans l’optique que ces transferts sont réalistes, ce qui n’est pas démontrable sans un développement qui remettrait en cause tout ce que nous connaissons jusqu’alors, nous aurions donc la preuve qu’une conscience n’est pas rattachée à un corps et qu’elle peut donc être déplacée, comme le pensent les philosophes bouddhistes évoqués plus tôt. L’hypothèse d’une conscience émergeant grâce à un agencement très particulier de cellules très particulières semble donc réfutée ici.

Dans cette scène finale, les consciences des morts sont déplacées d’un corps à un autre, grâce à un enchevêtrement de racines enveloppant les corps. Nous avons vu précédemment que les arbres pouvaient échanger des informations grâce à des phéromones. Ils peuvent tout aussi bien échanger des informations avec d’autres êtres vivants par l’intermédiaire du sol et de leurs racines. Si une conscience n’est composée que d’informations biologiques, génétiques ou moléculaires, celle-ci peut alors passer d’un être vivant à un autre. Les enveloppes corporelles des morts étant en contact avec le sol, tout comme celles de leurs Avatars récepteurs, les consciences pourraient ainsi être transférées par le biais de L’Arbre des Âmes, qui posséderait la faculté de conduire volontairement des informations d’un corps à un autre.

 

Mais qu’en est-il de la conscience elle-même ? Une définition que nous pourrions donner de la conscience est qu'elle est l'accumulation de tous les souvenirs, de toutes les expériences vécues par un individu. Si jusqu’alors nous n'avons envisagé que la perspective d’une conscience dissociée du corps, qu'elle utiliserait comme une enveloppe pour parvenir à ses fins, il est tout aussi probable que la conscience ne soit que le fruit d’un agencement très chanceux des milliards de neurones qui composent notre cerveau. Dans ce cas de figure, le transfert de conscience est donc très peu réaliste car celle-ci est construite sur des bases propres à chaque individu. Deux individus n’ont pas les mêmes bases, ce qui implique donc que leurs consciences soient totalement différentes. Aussi, lorsque l’arrêt du cœur provoque la mort, le cerveau cesse d’être irrigué constamment par un flux sanguin vital pour le fonctionnement des cellules qui le composent. Dans la mort, les neurones meurent donc progressivement. Si la conscience est bien issue uniquement de ces neurones, alors leur mort devrait entraîner l’arrêt pur et simple de la conscience, et empêcher alors tout transfert.

 

Pour conclure sur la réalité de ce transfert, il faut tout d’abord se poser la question de la nature de la conscience. Deux hypothèses se posent alors : soit la conscience est totalement différenciée du corps, soit elle est le fruit du vécu de l'individu. Dans le premier cas un transfert de conscience est alors possible, mais dans le deuxième, la mort pose alors un problème infranchissable. Néanmoins, sur un sujet vivant, la science n’a pas encore abattu toutes ses cartes et promet encore de nombreuses surprises!

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